L’actualisation des pensions

Partout dans le monde, les fonds de pension privés ont plus de mal à respecter leurs obligations envers les futurs retraités. En juillet 2012, les 100 plus grands fonds de pension privés américains ont connu un manque à gagner de 533 milliards de dollars, selon le cabinet de conseil Milliman. Au cours du même mois, les retraites privées du Royaume-Uni ont connu un manque à gagner de 283 milliards de livres sterling, selon l’assureur gouvernemental des régimes de retraite.
La situation actuelle des fonds de pension d’entreprise est le résultat de plusieurs facteurs: les faibles rendements boursiers au cours des cinq dernières années, le passage des actions aux obligations et les taux d’intérêt historiquement bas au cours de la dernière année.
Les faibles taux d’intérêt jouent un rôle essentiel dans le calcul des obligations des régimes de retraite. Plus précisément, les taux d’intérêt sur les obligations de sociétés de haute qualité sont utilisés pour déterminer le rendement sans risque attendu du régime à l’avenir – une mesure connue sous le nom de taux d’actualisation ». Si le taux d’actualisation diminue, un régime de retraite a besoin de plus d’actifs aujourd’hui afin d’être sûr qu’il peut générer des rendements d’investissement suffisants pour payer un montant prévu de prestations à l’avenir.
Par conséquent, le faible taux d’actualisation actuel pèse sur les régimes de retraite. Les dirigeants d’entreprise estiment que ce fardeau est injuste: ils soutiennent que les taux bas actuels ne reflètent pas vraiment les rendements attendus sans risque, mais plutôt les mesures politiques prises par les banques centrales.
Certains gouvernements ont allégé ce fardeau en imposant des taux d’actualisation plus élevés. En juin, le Danemark et la Suède ont adopté des approches directes en fixant des planchers ou des valeurs spécifiques pour les taux d’actualisation applicables à certaines obligations. Néanmoins, on ne sait pas ce que devrait être un taux d’actualisation précis. Une approche moins artificielle consisterait à utiliser les taux d’intérêt réels, calculés en moyenne sur plusieurs années. Les États-Unis ont récemment franchi cette étape: le Congrès a autorisé les sociétés à utiliser un taux d’actualisation basé sur des rendements obligataires de haute qualité en moyenne sur 25 ans, au lieu d’une moyenne sur deux ans comme dans les règles précédentes.
On estime que ce changement augmentera les taux d’actualisation d’au moins 100 points de base, ce qui réduirait considérablement le montant des contributions des sociétés américaines à leurs fonds de pension. Par exemple, David Zion du Credit Suisse estime qu’une augmentation de 100 points de base du taux d’actualisation entraînerait une baisse de la contribution requise d’UPS en 2013 de 1,6 milliard à 47 millions de dollars.
Les régulateurs britanniques doivent encore suivre les pas de leurs homologues américains, mais les entreprises britanniques font valoir leurs arguments. La Confédération de l’industrie britannique, un groupe représentant plus de 200 000 entreprises, a appelé à un lissage des taux d’intérêt sur plusieurs années ».
Alors qu’une période moyenne de cinq à 10 ans pourrait mieux refléter des conditions plus normales », une période moyenne de 25 ans, telle qu’elle est adoptée aux États-Unis, va clairement trop loin. Il est peu probable que les taux d’intérêt en 1988 aient une grande valeur prédictive pour les 10 à 20 prochaines années.
Dans tous les cas, les obligations payables au cours des prochaines années ne devraient pas bénéficier de taux d’actualisation plus élevés. Même si les taux d’intérêt actuels ne reflètent pas les attentes à long terme, ils représentent des rendements attendus sans risque à court terme.
Pour les obligations futures, nous préférerions idéalement un taux d’actualisation qui utilise les attentes pour l’avenir plutôt que des données du passé. Pour une approximation approximative, nous pouvons mesurer les attentes futures en calculant le taux d’intérêt à terme sur les actifs sans risque, tels que les bons du Trésor américain ou les cochettes britanniques. Ce taux à terme, ajusté pour l’écart historique entre les bons du Trésor ou les gilts et les rendements des obligations de sociétés concernées, pourrait refléter raisonnablement les rendements sans risque attendus à l’avenir.
À titre d’exemple spécifique, considérons un investisseur décidant entre (1) acheter un bon du Trésor à 20 ans aujourd’hui et le détenir jusqu’à l’échéance ou (2) acheter successivement deux bons du Trésor à 10 ans (une fois en 2012 et de nouveau en 2022). Le taux du Trésor à 10 ans à 10 ans »serait le taux du deuxième Trésor à 10 ans qui rendrait l’investisseur indifférent entre ces deux options. Actuellement, ce taux est d’environ 3%.
Bref, les faibles taux d’intérêt rendent les obligations des régimes de retraite plus intimidantes, car les fiduciaires des régimes ne peuvent pas compter sur les attentes de rendements de placement solides.
Mais les décideurs doivent être prudents lorsqu’ils envisagent quel devrait être le bon taux d’actualisation. Et si les taux d’intérêt historiquement bas d’aujourd’hui ne sont pas une aberration qui disparaîtra rapidement? Si tel est le cas, des augmentations temporaires du taux d’actualisation ne feront que retarder, plutôt qu’empêcher, la journée ou le calcul des pensions.